29 janvier 2015 – Le journal de l’UD CGT 04 du mois de janvier 2015

Journal UD CGT 04 janvier 2015


Sommaire :

Page 1 : Edito d’Alain Bard, SG UD CGT 04

Pages 2 et 3 : Le projet de loi Macron (explications, rassemblement et conférence/ débat)

Page 4 : Mutualisation des SAMU 04 et 05 : rassemblement du 16 janvier + Le prochain Congrès de l’UL de Manosque

Page 5 : L’Usine de Saint-Auban fête ses 100 ans + Les formations 2015 (première partie)

Page 6 : Le bulletin de salaire : les branches maladie, AT, MP…

Page 7 : Un peu d’humour

Page 8 : Culture (ouvrage, interview vidéo, film et évènement)

Pour consulter le journal, CLIQUER ICI

27 janvier 2015 – Pour ne plus perdre sa vie à la gagner !

Pour renforcer le dialogue social, il faudrait l’affaiblir ? Non, nous pensons au contraire qu’il est urgent de renforcer les moyens et les droits des salariés et de leurs représentants.
Je vous invite donc à signer cette pétition et à mettre en œuvre tous les moyens à votre disposition pour empêcher ces réformes.

Pour signer la pétition, CLIQUER ICI

Pour ne plus perdre sa vie à la gagner !

La santé au travail est une question de santé publique. Or chaque semaine qui passe voit se multiplier les attaques du patronat et du gouvernement contre les droits sociaux, notamment en matière de santé au travail. Pourtant, la situation est alarmante : au nom d’une soi-disant « rationalisation » des coûts, les logiques organisationnelles aujourd’hui à l’œuvre au sein des entreprises, dans l’industrie comme dans les services, dans le secteur privé comme dans le public, contribuent à aggraver l’exploitation des corps et à dégrader de manière profonde la santé de nombreux travailleurs. Résumer la situation actuelle à une crise de l’emploi revient à dissimuler ces autres dérives de notre système productif. Mais certaines des mesures récemment adoptées, comme plusieurs de celles qu’envisagent aujourd’hui le gouvernement ou les organisations patronales vont plus loin : un à un, les différents acteurs de la chaîne de prévention voient leurs prérogatives ou leur marge d’action se réduire et, avec elles, ce sont les instruments de la prévention des risques et de la protection des salariés qui se trouvent remis en cause.

Affaiblir les droits collectifs des travailleurs

La négociation collective engagée depuis septembre, à la demande du gouvernement, autour d’un projet de réforme des seuils sociaux s’affiche comme visant à « faciliter la vie des entreprises et les aider à embaucher ».
Celle-ci se révèle en fait l’occasion d’une attaque en règle du patronat qui veut limiter toute possibilité de représentation du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés et faire table rase des droits existants au-delà, en invoquant une instance unique aux missions vagues et dépossédée des principales prérogatives des IRP actuelles.
Cette nouvelle attaque fait suite aux réorganisations imposées à l’inspection du travail (remise en cause de son indépendance, réduction de ses moyens en effectif de contrôle) ainsi qu’à celles des Conseils de Prud’hommes (suppression de l’élection, restrictions budgétaires, diminution des délais de prescription, manque de personnel de greffe, etc.).
Le projet de loi Macron présenté en conseil des Ministres le 10 décembre 2014 enfonce le clou en prévoyant de rendre plus difficile la possibilité pour la justice pénale de sanctionner les employeurs délinquants.

Supprimer les CHSCT ?

Plus ou moins masquée parmi ces multiples attaques, s’exerce la tentative du patronat de remettre en cause l’existence même des CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) dont les prérogatives ont été déjà affaiblies par les dispositions introduites par la loi sur la « sécurisation de l’emploi » transcrivant l’ANI du 11 janvier 2013.
Or les CHSCT constituent un outil collectif fondamental pour permettre aux travailleurs de s’exprimer et d’agir sur leurs conditions de travail. C’est d’ailleurs parce qu’ils permettent de rendre visibles les manquements des directions d’entreprises en matière de santé et sécurité au travail, que le patronat veut les supprimer.
Instaurés depuis 1es lois Auroux de 1982 dans les entreprises de plus de 50 salarié-e-s, les CHSCT ont largement démontré leur utilité dans la défense de la santé et l’amélioration des conditions de travail des salarié-e-s. Il en est de même s’agissant de leur capacité à mettre en cause de manière forte les choix organisationnels dans les atteintes au travail lui-même (défauts, dysfonctionnements, impossibilité de bien faire son travail) et à la santé physique et psychique des travailleurs.
Grâce aux moyens d’action des représentants du personnel comme le droit d’alerte, le droit d’enquête, le droit d’expertise, cette instance permet de proposer et d’obtenir des améliorations des conditions de travail, et au besoin d’agir directement en justice, pour prévenir des mises en danger ou faire interdire des formes d’organisation à risques ou pathogènes. Elle permet aussi d’aider à la reconnaissance de la faute inexcusable des employeurs.
Il est donc crucial d’œuvrer plutôt à lever les obstacles qui entravent encore trop souvent le fonctionnement de cette instance. Il s’agirait notamment de permettre aux travailleurs qui, de droit ou de fait, en sont encore privés (en raison de la taille de l’entreprise, de la dispersion des salariés sur des sites multiples, ou encore des différences de statuts et des effets de la sous-traitance en cascade…, autant de situations trop souvent utilisées par les employeurs pour contourner le droit et diviser les salariés) de pouvoir eux aussi en bénéficier.
Dans la même logique, le fait d’offrir un véritable statut protecteur contre le licenciement aux salariés usant de la faculté de leur droit de retrait en raison d’un danger grave et imminent permettrait de passer d’un droit théorique à un droit réel.

Une médecine du travail en miettes :

La médecine du travail est en grand danger et avec elle la santé de tous les salariés. Fin octobre, F. Hollande présentait 50 nouvelles mesures destinées à « simplifier l’activité des entreprises face à la lourdeur administrative. »
Parmi elles, une première entend revoir les notions d’aptitude et d’inaptitude afin de « sécuriser » les employeurs qui sont « soumis » à des avis médicaux avec réserves trop contraignants. Cette mesure vise à empêcher le médecin du travail d’émettre des préconisations d’aménagement des postes de travail dans l’intérêt des salariés, à supprimer l’obligation de reclassement qu’ont les employeurs et à favoriser le licenciement des salariés ayant des restrictions d’aptitude.
Une seconde mesure prévoit de simplifier les règles sur les visites médicales des salariés au motif que « la visite médicale obligatoire n’est réalisée que dans 15% des cas », du fait notamment d’un manque d’effectifs médicaux. Ce chiffre de 15 % est fantaisiste car en réalité ce sont plus de 70% de ces visites qui sont actuellement assurées ! Cette mesure empêcherait l’accès à la visite médicale et au suivi de santé individualisé pour certaines catégories de salaries jugés non exposés à des risques. Alors que l’on assiste à l’explosion des TMS et des RPS, cette vision est inacceptable.
Nous rappelons que les médecins du travail sont les seuls médecins à disposer d’une formation sur les risques professionnels et qu’ils sont les seuls à bénéficier d’un statut protecteur garantissant indépendance et protection vis-à-vis des employeurs. Ils ont un libre accès au poste de travail qui leur permet de disposer d’une connaissance des risques et du travail réel. En s’attaquant ainsi à la visite médicale, c’est à la médecine du travail toute entière que le gouvernement s’en prend et aux droits des salarié-es.
En affaiblissant une nouvelle fois la médecine du travail et plus largement les services de santé au travail (SST), le patronat et le gouvernement favorisent la fragilisation des travailleurs confrontés à des conditions de travail et d’emploi de moins en moins soutenables.
Il conviendrait au contraire de donner aux SST tous les moyens d’assurer leur « mission exclusive d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail » (art. L.4622-2 du code du travail), en élargissant et en confortant notamment leur indépendance vis-à-vis des employeurs.

L’urgence d’agir et de s’unir

La santé au travail est au cœur de l’activité de tous les acteurs impliqués dans la prévention des risques et l’amélioration des conditions de travail. Dans le contexte actuel, tous devraient voir leurs conditions d’intervention favorisées et améliorées : CHSCT, médecins du travail, inspecteurs du travail, contrôleurs Carsat, experts CHSCT, intervenants en prévention de la mutualité, tous interagissent de façon complémentaire au sein d’un ensemble devenu cohérent, celui de notre système de prévention. C’est lui qui, morceau par morceau, est progressivement défait depuis quelques années ; c’est lui que nous voulons préserver et renforcer.
Nous acteurs du mouvement syndical et de la santé au travail (syndicats, représentants du personnel au CHSCT, médecins du travail, inspecteurs du travail, experts CHSCT, psychologues du travail, ergonomes, chercheurs en santé au travail, etc.) appelons à une mobilisation et à l’organisation d’états généraux pour défendre et améliorer les droits collectifs des travailleurs en matière de santé au travail.

… Pour ne plus perdre sa vie à la gagner !

22 janvier 2015 – Boris Cyrulnik : Point de vue sur les récents actes terroristes en France

Nous vous recommandons l’excellent entretien du neuropsychiatre Boris Cyrulnik sur la plateau de TV7.

Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik estime que les terroristes islamistes sont volontairement façonnés selon une mécanique identique à celle qui a amené au régime nazi
Terroristes islamistes : « C’est la même mécanique que pour les nazis »

De passage à Bordeaux pour la parution de son dernier livre « Les âmes blessées » (Odile Jacob) et la commémoration de la rafle des juifs, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik a participé à l’émission « Point de vue » sur TV7. Il y a longuement commenté l’actualité, le dramatique attentat de Charlie Hebdo et la prise d’otages de Vincennes.

Ci-joint quelques extraits de l’interview :

« Au sujet de la violence semblable au nom d’une religion, il explique que cela s’est déjà vu dans le passé. Cela existe depuis longtemps. On met la haine dans des quartiers en difficulté, on repère les enfants, on leur offre des stages de formation. Ce sont des groupes politiques qui utilisent le terrorisme comme une arme. Quand la haine est semée, on repère les enfants les plus faciles à fanatiser et on les envoie au sacrifice. Cette organisation est financée par les gens du pétrole et de la drogue, qui ont des intentions politiques sur le Moyen-Orient et l’Occident. »

« L’inquisition chrétienne relève du même processus. Le nazisme est parti de la belle culture germanique allemande, et en quelques années a mis le feu au monde. Des slogans sont entrés petit à petit dans la culture commune. La population s’est soumise à une représentation dépourvue de jugement. La société s’est imprégnée de ces idées. »

« On peut faire de cette tragédie une solidarité ou un massacre. Les musulmans français sont en danger. Ils risquent d’être agressés. 99% des arabes tués dans le monde le sont d’ailleurs par d’autres arabes. Ces phénomènes se sont produits dans l’histoire et se reproduiront. »

« Ces terroristes ne sont pas des fous, ni des monstres. Ce sont des enfants normaux et en détresse, façonnés intentionnellement par une minorité qui veut prendre le pouvoir. Ces enfants sont abandonnés, en difficulté psychosociale et éducative, et il faudrait d’abord les éduquer. Ils le sont par les réseaux sociaux qui sont une arme pour façonner ces jeunes. Internet véhicule une représentation facile de la réalité, une pensée paresseuse à l’origine de toutes les théories totalitaires. Avec une minorité d’hommes formés, payés et armés, manipulés et fabriqués, on peut détruire une civilisation. Cela a été fait. L’inquisition et le nazisme l’ont fait. »

« Je veux parler de la responsabilité de nos gouvernants qui ont abandonné culturellement les gosses de nos quartiers et les ont soumis à des manipulateurs. L’Allemagne nazi était très cultivée, mais la base de la société ne l’était pas du tout. C’est exactement la même chose dans les pays du Moyen-Orient. »

« C’est la même mécanique dans la tête d’un nazi et d’un fondamentaliste islamiste.
Freud disait les mots désignent des choses au début, puis des choses qui ne sont pas là et c’est la fonction du symbole, et enfin ils finissent par ne plus rien désigner du réel. A ce moment là, on se soumet à un slogan. Quand une culture ne permet pas la rencontre et le débat, on est des proies et internet démultiplie le pouvoir de ces manipulateurs. »

31 décembre 2014 – Les règles du jeu – Sortie au cinéma en janvier 2015

Les règles du jeu, Claudine Bories

Date de sortie : 07 janvier 2015
Réalisé par : Claudine Bories et Patrice Chagnard
Durée : 1h46 min
Pays de production : français
Année de production : 2014
Distributeur : Happiness Distribution

L’ACID, vitrine de choix pour les films indépendants, présente chaque année une sélection parallèle lors du Festival de Cannes. En 2014, parmi les neufs films sélectionnés, le duo de réalisateurs présente leur nouveau documentaire, qui retrace le parcours d’une poignée de jeunes au chômage, pris en charge pour apprendre, comme l’indique le titre du film, « Les règles du jeu » social.

RESUME DU FILM :

Lolita n’aime pas sourire. Kévin ne sait pas se vendre. Hamid n’aime pas les chefs.
Ils ont vingt ans. Ils sont sans diplôme. Ils cherchent du travail.
Pendant six mois, les coachs d’un cabinet de placement vont leur enseigner le comportement et le langage qu’il faut avoir aujourd’hui pour décrocher un emploi.
A travers cet apprentissage, le film révèle l’absurdité de ces nouvelles règles du jeu.

INTERVIEW DE CLAUDINE BORIES ET PATRICE CHAGNARD :

En 7mn58, ils reviennent sur les raisons de la réalisation de leur film.

Pour visionner la vidéo, CLIQUER ICI

PAROLE DE CINEASTE :

Dans l’espace désincarné d’un cabinet de placement, deux mondes se confrontent. À défaut de s’entendre vraiment, des jeunes chômeurs et leurs encadrants font leur possible pour s’accorder. Les écarts de classe apparaissent d’emblée dans la langue, dans les contenances comme dans les valeurs affichées : dire la vérité ou choisir le mensonge, refuser l’injustice ou se résigner. Sollicitude d’un côté, application de l’autre : chacun joue le jeu tant que l’illusion tient. Quand les faux-semblants ne sont plus supportables, la détresse pointe et la colère éclate. Nous partageons la joie sincère des deux parties quand un contrat d’embauche est enfin signé, puis la déconvenue s’impose de nouveau devant la vérité de l’exploitation. À cela s’ajoute le poids des secrets dont la douleur est si intense qu’elle interdit tout espoir. La vie de ces jeunes êtres commence à peine et « c’est déjà trop tard » pour certains.
« Ce qui est terrible sur cette terre, c’est que chacun a ses raisons » disait Jean Renoir dans sa propre Règle du jeu, et rien n’est simple en effet. Chacun a sa règle : jouer le jeu du monde ou le refuser. Le film ne juge pas. Il laisse à chacun le soin de se déterminer.
Le film ne juge pas, mais il rappelle la dureté de la vie par des paysages désolés où des usines solitaires apparaissent au loin, à la lisière des friches. Le monde est un jeu facile pour ceux qui acceptent de jouer le jeu du pouvoir. Il est un bagne pour les autres. Il n’y a pas de place pour l’innocence.
Jean-Loïc Portron, cinéaste

Pour consulter le 4 pages de présentation du film, CLIQUER ICI

23 décembre 2014 – Emanciper le travail : le nouvel ouvrage de Bernard Friot

(Eloge du salaire socialisé)

Le modèle capitaliste du travail conduit à notre perte : il est urgent de prendre la mesure des dynamiques porteuses d’émancipation. Dans son nouveau livre, Emanciper le travail, Bernard Friot décrit le conflit social qui se poursuit depuis 1945 comme un affrontement entre deux façons contradictoires d’attribuer une valeur économique au travail. Pour le capital, seul un travail soumis aux propriétaires lucratifs et au marché du travail produit de la valeur. Mais les luttes syndicales et les initiatives populaires ont institué au contraire, grâce à la socialisation du salaire, une reconnaissance du travail tout autre, fondée sur le salaire à vie, sur la propriété d’usage des entreprises par les salariés, sur un investissement libéré des prêteurs, sur une autre mesure de la valeur que le temps. Au fil de cinq entretiens avec Patrick Zech, Bernard Friot met en évidence l’invention, depuis plus de soixante ans, d’un travail libéré de l’emprise capitaliste.

Emanciper le travail, Bernard Friot

Nous donner le projet d’émanciper le travail est la seule ambition à la hauteur de la classe ouvrière, elle qui a imposé la Sécurité sociale, le statut de la fonction publique, la qualification dans les conventions collectives, ces institutions que les « réformateurs » ont entrepris de détricoter depuis trente ans. Cela n’est possible, on le pressent, qu’en nous organisant non pas pour défendre ces institutions du salaire – ce qui est le début de la défaite –, mais pour les généraliser, dans le salaire à vie pour tous, dans l’attribution de tout le PIB au salaire socialisé afin de rendre possible l’expropriation de ceux qui nous imposent leur pratique du travail, si désastreuse.

Nous donner le projet d’émanciper le travail, c’est sortir du statut de victime, c’est nous poser en candidats à la succession de la bourgeoisie dans la maîtrise de l’économie. C’est donc réinscrire notre mobilisation dans la profondeur historique de la mobilisation sur le salaire, partiellement victorieuse, qui a construit des institutions anticapitalistes qui ne s’usent que si on ne s’en sert pas.

La vitalité militante est considérable, qu’elle s’exprime dans le combat syndical ou dans des expérimentations locales d’appropriation de notre travail et de maîtrise de nos vies. Mais elle est confrontée à l’impuissance politique, car elle sous-estime le déjà-là subversif du capitalisme construit par la classe ouvrière au vingtième siècle. Ne pas s’appuyer sur les tremplins disponibles, c’est s’exposer à se tromper de chemin, tout en laissant en déshérence des places fortes conquises que les coups de boutoir réformateurs peuvent mettre gravement en cause. Quel gâchis quand des collectifs engagés dans d’intéressantes productions alternatives revendiquent un revenu d’existence, quand des militants syndicaux et politiques se mobilisent pour une révolution fiscale ! Quelle dépense d’énergie sur des objectifs à la fois faux et tellement en deçà des conquêtes de la classe ouvrière lorsqu’elle était à l’offensive !

Le nœud de l’affaire se trouve dans une notion abstraite : la valeur économique. Faire société, ça n’est pas seulement organiser la production des biens et des services nécessaires à la vie commune, ce qu’en langage technique on désignera par l’expression « production de valeurs d’usage ». C’est aussi affronter la violence dans laquelle cette production s’opère, une violence qui s’exprime dans la valeur économique : la valeur d’échange dans le capitalisme, dont il s’agit de se débarrasser pour une pratique de la valeur libérée de la violence spécifique au capital. Autrement dit, faire société, c’est à la fois assumer la coopération des humains avec la nature dans du travail concret, et assumer le conflit irréductible qui se joue entre humains dans l’appréciation de ce qui, dans cette production concrète, vaut et ne vaut pas.

Dans le capitalisme, pour qu’une activité productrice de valeurs d’usage soit considérée comme du travail producteur de valeur d’échange, il faut qu’elle soit menée par une force de travail achetée par un propriétaire lucratif et mobilisée pour la production de marchandises qui, vendues, rapporteront à ce propriétaire un profit tiré de la différence entre la quantité de travail présente dans ces marchandises et celle que représente le salaire. Toutes les autres activités sont considérées comme non productives, c’est-à-dire non productrices de valeur économique.

Or ce qu’institue 1945 avec le statut de la fonction publique, avec les cotisations sociales, c’est le versement d’un salaire à des producteurs de valeur d’usage qui ne vont pas sur le marché du travail, qui ne produisent pas de marchandises sous la loi du temps de travail, qui ne mettent en valeur aucun capital. Que signifient ces salaires ?

On comprend la réponse des capitalistes et des réformateurs à leur service : ces salaires ne sont pas des salaires, ils ne signifient pas que ceux qui les perçoivent sont productifs. Ils sont rendus possibles par une ponction sur la valeur créée dans la sphère capitaliste. Les impôts qui paient des fonctionnaires, les cotisations qui paient des retraités, des soignants, des parents, des chômeurs sont des prélèvements obligatoires qui certes offrent un revenu pour des activités utiles, mais pèsent sur la production de valeur. Jusqu’ici, rien que de très normal : la classe dirigeante tient un discours de classe qui naturalise sa pratique de la valeur économique.

Là où le bât blesse, c’est lorsque les militants opposés aux réformateurs partagent avec eux cette analyse qui fait de la pratique capitaliste de la valeur un invariant, qui postule qu’avec le statut de la fonction publique, avec les cotisations de Sécurité sociale, on a certes rendu possibles une distribution non marchande de l’éducation ou de la santé et une solidarité des actifs avec les inactifs, mais qu’on n’a rien changé à la production de valeur et que les fonctionnaires, les retraités, les soignants, les parents et les chômeurs sont utiles mais improductifs.

Identifier la valeur capitaliste à « la valeur », sans voir qu’une partie de la valeur en est déjà libérée, c’est s’ôter tout outil pour vaincre le capital, c’est devenir un des protagonistes du théâtre d’ombres où se perd depuis plus de trente ans la combativité populaire. Ces protagonistes vont par deux, ce sont pour l’essentiel :

– le couple de Monsieur Changement Du Curseur, qui mobilise pour un meilleur partage de « la valeur » grâce au plein-emploi, à la révolution fiscale, à la réduction du temps d’emploi, et Madame Forces Productives, qui mobilise pour la croissance de « la valeur » par progression des gains de productivité avec la révolution informationnelle ;

– le couple de Monsieur Millénarisme, qui attend que « la valeur » et le travail disparaissent avec l’effondrement auquel la baisse du taux de profit conduira le capitalisme, et Madame Horreur Economique, qui entend débarrasser les valeurs d’usage de « la valeur » avec la fin de la monnaie et du travail.

La mobilisation populaire peut être sortie de ces deux impasses symétriques si nous reconnaissons que les conquêtes de 1945 sont anticapitalistes parce qu’elles inaugurent une autre pratique de la valeur et du travail par un changement radical du salaire. D’où vient le salaire des fonctionnaires, des retraités, des soignants, des parents et des chômeurs ? De leur travail. Ce sont eux qui produisent la valeur que reconnaissent l’impôt et les cotisations sociales, et cela sans marché du travail, sans mesure de la valeur par le temps de travail, sans actionnaires et sans crédit.

Non pas parce que, par un miracle nominaliste, l’attribution d’un salaire aux retraités ou aux fonctionnaires transformerait d’elle-même leur activité en travail productif, mais parce qu’une lutte de classes a été menée pour instituer la fonction publique, la cotisation-salaire, la qualification personnelle, et pour les légitimer comme matrices du travail à la place de l’emploi capitaliste, comme vectrices d’une autre pratique du travail et de la valeur, émancipée de sa violence capitaliste. « La valeur » n’existe pas sans qualificatif, la valeur est prise entre sa pratique capitaliste et sa pratique salariale. Mais l’en-soi révolutionnaire des conquêtes de 1945, qui depuis trente ans résistent aux réformateurs, finirait par être très menacé s’il n’était plus porté, légitimé, généralisé par une classe révolutionnaire au service de l’institution de la pratique salariale de la valeur.

Cette classe à construire, c’est le salariat, c’est-à-dire l’organisation autonome de celles et ceux qui vont assumer la portée anticapitaliste des institutions du salaire : le salaire à vie de la fonction publique et des retraites, la cotisation y compris pour financer l’investissement, la propriété d’usage des outils de travail, la mesure de la valeur par la qualification des producteurs.

Ces institutions anticapitalistes expliquent déjà une part notable du PIB et n’attendent que d’être enfin assumées par un salariat organisé pour les généraliser. Construire le salariat, c’est bien sûr partir de toutes les luttes et mobilisations actuelles, telles qu’elles sont menées y compris dans leur stratégie mortifère. Les militants sont là, il est hors de question de les disqualifier, eux. Il faut au contraire les armer pour qu’ils déplacent leurs mots d’ordre, aujourd’hui très en deçà du nécessaire et du possible, vers des mots d’ordre à la hauteur des institutions du salaire et de leur pratique anticapitaliste de la valeur et donc du travail.

C’est là l’ambition de cet ouvrage. Nous nous sommes rencontrés à Liège lors d’une formation assurée par Bernard et organisée par Patrick, qui anime dans cette ville à la sidérurgie sinistrée Réseau Salariat, et nous avons eu l’idée d’un livre d’entretiens construit à partir des questions qui reviennent le plus souvent dans les débats et les formations.

Ces entretiens déplacent le regard vers la valeur économique. Les deux premiers racontent comment, sur le terrain décisif de sa maîtrise, la classe ouvrière a été en partie victorieuse en permettant le développement d’institutions du salaire anticapitalistes. Le troisième porte sur les possibles qu’ouvrent ces conquêtes en termes de généralisation de la pratique salariale de la valeur. Le quatrième explique les impasses actuelles des mobilisations par le fait qu’elles évitent de porter le fer sur le terrain du changement de la pratique de la valeur. Le cinquième montre concrètement comment sortir de ces impasses par des revendications intermédiaires orientées vers la généralisation des institutions de la pratique salariale de la valeur.

Il est possible de vaincre, non pas dans le volontarisme d’une démarche utopique, mais dans la poursuite décidée de ce qui a déjà été conquis.

8 octobre 2014 – « Un quart en moins » le nouvel ouvrage de Rachel Silvera (des femmes se battent pour en finir avec les inégalités salariales)

« Un quart en moins », Rachel Silvera

A travail de valeur égale, salaire égal…Mais malgré les lois, les discours et les chartes, le salaire des femmes reste inférieur d’un quart à celui des hommes. Portant un nouveau regard sur cet écart, Rachel Silvera montre qu’il est possible de gagner sur ce front, mais aussi sur celui de la revalorisation des emplois des femmes. Ces dernières années, des femmes, pas toujours syndiquées ou féministes, ont réussi à prouver qu’elles étaient victimes de discrimination salariale. Parce qu’elles ont eu des enfants sont passées à temps partiel ou tout simplement parce qu’elles sont des femmes, Maria, Flora et d’autres n’ont eu aucune augmentation de salaire, ou très peu, au cours de leur carrière. Elles ont gagné leurs procès, obtenant parfois des rappels de carrière conséquents. Rachel Silvera leur donne largement la parole et propose de nouveaux leviers d’action.

Rachel Silvera, économiste, est maîtresse de conférences à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense, chercheuse associée au CERLIS (Université Paris Descartes) et membre du réseau de recherche « Marché du travail et genre » (Mage). Elle est membre de la commission confédérale femmes-mixité.

13 juin 2014 – L’ANFH propose des formations gratuites…pourquoi l’occulter ?

Nous constatons que les salariés de nombreux établissements sont très peu informés de leurs droits en matière d’accès à la formation. Cela se ressent notamment lors des informations régulières de l’ANFH (Association Nationale pour la Formation Permanente du Personnel Hospitalier). L’ANFH collecte et gère les fonds consacrés par les établissements adhérents au financement de la formation professionnelle continue. Mais, l’ANFH met en place également de nombreuses actions de conseil ou de formation pour les établissements.

Les DRH (Direction des Ressources Humaines) des établissements sont régulièrement informées, par exemple, sur des formations gratuites dont peuvent bénéficier leurs agents. Alors que certaines DRH sont très friandes de ce type de formations et en font bénéficier leur établissement et leurs agents, d’autres ne font jamais circuler ces informations. Nous regrettons vivement que les agents n’en soient pas informés. Pouvoir bénéficier de formations gratuites, qui parfois peuvent atteindre plusieurs milliers ou dizaines de milliers d’euros est une chance pour les agents, mais c’est également une chance pour les établissements. La possibilité d’améliorer les compétences de ses personnels est louable et bénéficie aux établissements ainsi qu’aux salariés.

Des formations de quelques jours (comme la gestion du personnel de la Fonction Publique Hospitalière, le travail de nuit, ou l’accompagnement pluri-disciplinaire de la personne âgée) sont proposées. Mais, il existe également des formations qualifiantes (comme agent de stérilisation, maîtresse de maison ou technicien d’information médicale). Ce sont des formations de quelques jours par mois pendant une année environ, avec un diplôme à la clé.

Pour rappel, les formations proposées pour 2014 sont les suivantes :

Management, Ressources Humaines et Pilotage Financier :

* La gestion du personnel de la Fonction Publique Hospitalière
* La retraite du personnel hospitalier
* Accompagnement dans le reclassement professionnel et la reconversion
* Être tuteur de contrats Emplois d’Avenir
* Qualité du dialogue social dans les établissements relevant de la Fonction Publique Hospitalière
* Achat public : construire et piloter un plan d’action achats / optimiser son rôle d’acheteur
* Marchés publics adaptés aux établissements sociaux et médico-sociaux
* Fiabilisation du bilan et impératifs documentaires à la certification des comptes
* Comment mettre en place une méthodologie dans le cadre de la certification ANESM
(agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux)
* Décliner la GPMC en démarche projet (Gestion Prévisionnelle des Métiers et des Compétences)
* Accompagner les réticences aux changements
* Notions de compétences et entretien professionnel dans une démarche GPMC
* Prospectives métiers dans le cadre d’une mise en place d’une démarche de GPMC

Renforcement des Compétences et Adaptation à l’Environnement :

* Comment construire un programme de DPC
* Formation d’animateur : formateurs d’actions de DPC
* Le travail de nuit
* Accompagnement pluri-disciplinaire de la personne âgée
* Animer le travail en équipe : qualité de travail, qualité de vie au travail
* Construction d’un projet de chirurgie ambulatoire
* Gestion des risques associés aux soins en équipe dans les établissements sanitaires et médico-sociaux de la fonction publique hospitalière
* Impact de l’architecture sur l’organisation et les conditions de travail

Formations Diplômantes, Qualifiantes ou Certifiantes :

* Certificat d’aptitude aux fonctions d’ASG (Assistant de Soins en Gérontologie)
* Titre professionnel de maîtresse de maison
* Titre professionnel de surveillant de nuit qualifié

Modalités de Prise en Charge / Inscriptions :
Pour toute inscription, veuillez vous rapprocher du service formation de l’établissement qui fera un retour groupé de toutes les inscriptions à l’ANFH.

Pour plus de précisions, n’hésitez pas à nous contacter.